Il sentait l’ambre ou autre chose de fort et d’un peu sucré. Sa peau était tout doucement dorée. Il riait discrètement, comme s’il ne croyait pas même à ce rire. Du cynisme, bien installé dans un système logique en contreplaqué, gonflé à l’air lourd de l’intelligence, il avait fait sa foi. La gravité n’était qu’une comédie, pauvre jeu dérisoire auquel il fallait bien assister, tant bien que mal, mais surtout sans conviction. Tout avait été pesé avec une minutie rapide, et dépecé d’avance. Les questions étaient déjà traitées, pourvu qu’elles le soient, quitte à les décapiter. Tous les problèmes avaient leurs alibis.
La liberté ?« Ah mais non c’est une illusion ! Ne suis-je pas pris dans les déterminations de ma vie ? Et mon origine n’est elle pas l’immanquable lieu de mon retour ? Les boucles sont déjà bouclées ! Le destin lui-même m’excuse pour mes faillites et m’exonère du poids de mes réussites ».
L’amour ?« Ah mais non c’est une plaisanterie ! Ne suis-je pas un animal que la biologie excite à simuler un attachement aux autres interchangeables ? Et leurs yeux sont-ils autre chose que de nouveaux miroirs dans lesquels me voir, pour me prouver qu’au beau milieu de ce désert de l’existence, il y a moi, qui existe vraiment, même sans y croire ? Les bouches sont déjà ouvertes pour m’attendre, et cette façon que j’ai de plaire me lasse tant…un jour je serai fidèle en pensant à mes infidélités, comme un temps de félicité…. L’amour ah ca non, j’ai été blessé une fois, je me souviens, dans une autre vie. Ah ! je les connais les sensibles et les cœurs mous, et l’on ne m’y reprendra plus. J’ai déjà joué à ce tour là, et cela passe crois moi ! ».
La vie ?« Ah mais non c’est une absurdité ! Pourquoi devrais-je agir comme ceci plutôt que comme cela puisque les directions que je prends ne sont que d’égaux mirages ? Les caractères et les défauts, les actes et les abstentions, tout cela mène toujours au tombeau, alors à quoi bon ? La grande question métaphysique, je la récuse, je n’ai qu’à dire qu’elle n’existe pas, et plus j’ai conscience de pouvoir l’évincer par cette seule pensée, et plus j’ai conscience que je suis seul à lui avoir parfois donné de l’importance, plus elle me semble ridicule. D’un revers de main, avec effet de manche, je gesticule, et projette le monde dans le vestibule d’une grande soirée à laquelle aucun de nous n’est invité. Elle sera morte, la vie, avant que l’on ait pu la commencer… »
Prendre les choses au premier degré, à cœur pourquoi pas, lui paraissait être une étourderie d’enfant, que lui-même enfant n’avait pas eu l’impression de commettre.
« La maturité de l’homme, c’est d’avoir retrouvé le sérieux qu’on avait au jeu quand on était enfant. »
Friedrich Nietzsche
Valériane Des Voiles
image d’illustration tirée du film « La Grande Bouffe »…Un grand classique, où l’homme alibi exerce sa logique.
L’homme alibi « toutnicotatournicoti » dans les tourbillons de la vie
Cette année ?! Attention aux méninges Bibi !