Et si je n’avais aucune envie de maîtriser l’exercice?

Savoir comment si prendre, s’entraîner pour la forme, et connaître la chanson, faire un atelier d’écriture et maîtriser les rythmes, les blancs, les figures de style…c’est très utile. Mais tout ce que j’ai, c’est ma naïveté.

La force de continuer à se planter. Ne rien savoir pour tout apprendre. Ma naïveté c’est tout ce que j’ai. Marcher toute nue. Avancer avec ça. Se blesser, rire-pleurer, cramer, mais inventer. Inventer un truc qui ne marchera peut-être pas. Un truc qui va sur la tête, qui marche sur trois pattes ou qui n’en casse pas trois à un canard. Un petit machin.
C’est naïf comme une patate en patte à sel. C’est naïf comme un dessin de camion, comme une cerise à l’oreille (et en plus c’est déjà vu!). Naïf comme un mode de vie. Se faire avoir. Pas de problème, je sais faire ça. Et demain, on efface l’ardoise. On pardonne tout.

Et si la naïveté, c’était tout ce qu’il me reste? Et si c’était tout ce qu il nous reste dans cette existence de misère, où l’autre crève de froid, d’envie, d’ennui, emmuré vivant ou mort depuis le début? Et si la naïveté était un choix rationnel? Un moyen de dire non complètement en prononçant un universel petit « oui »? Oh oui! Oh oui?

Dans ces rues pleines de gens intelligents qui savent bien que tout passe, qui savent mieux que les autres que rien ne vaut la peine, qu’on fait semblant, je veux de la naïveté. Je veux pas du rêve. Je veux du conscient. De la naïveté qui sait qu’elle va se planter (puisqu’à la fin, on meurt!). Que forcément, ça va merder. Mais qui y va. Vite! En sautillant et en y croyant. Ça n’existe pas, mais j’y crois quand même.

Mon horizon, les variables possibles et les choix impossibles, je ne t’atteindrai pas. Mais j’espère encore te rejoindre.

Et si la naïveté, c’était ma vraie liberté ?

Valériane Des Voiles