L’amour qui opprime, qui oppresse et qui comprime…Non, merci !

L’amour étiquette, qui colle aux basques et enferme, qui réduit et s’abaisse…Non, merci!

L’amour pour toujours, la grosse promesse qui pourrit l’infini…Vraiment, non, merci!

On a cru que l’amour, le bel amour, était une passion ou un état calme. L’un ou l’autre, il faudrait choisir. On oppose un cœur et une raison, chacun pour soi, en soi, entité de verre, fragile et transparente, sans consistance, mais joliment moulée. Voici ce que l’on dit.

On a cru que l’amour dans sa jeunesse était impétueux, visible et éclatant, tonitruant, fatiguant. Que justement, lorsque d’épuisement les amants finissaient par s’aimer sagement, on atteignait alors à l’amour sage, lucide et discret, force tranquille et lente stabilité. Voici ce que l’on croît.

Mais voilà: ce sont des foutaises! Des fadaises pour ménagères dociles et maris vidés! Des mensonges pour humilier l’amour qui est grand.

On a cru que l’amour était plus fort s’il était souffrance.

« Mais si tu pars mon aimé, je m’incline et bois à la coupe de ta liberté. Vas donc où tes pas te mènent. Je conduirais les miens autrement, -tu me manqueras-, mais je te t’imposerai plus l’amour, et c’est ça l’amour. »

Aimer l’absent c’est trop facile. C’est coiffer un cadavre, avec des fleurs ou des épines, et l’honorer tout en le détruisant. Il est ailleurs celui qui est parti, et dans son absence honorée et chérie, il appartient encore à celui qui se complaît à l’habiller, à le maquiller comme une poupée inanimée. Mais qui dans ses hommages oublie d’aimer….

« Si j’aime vraiment, le manque même deviendra autre chose. Avec le temps, l’autre vivra dans un oubli. Il aura fait parti de ma vie, et sera digne de tout ce qui alors était advenu de beau et de vrai. Mais un autre amour naîtra de ma vie recommencée. »

L’amour c’est un élan. C’est la liberté. Aimer assez pour se multiplier, ne pas se figer, ni pétrifier l’aimé. Ne pas le mettre en vitrine; ne pas le transformer en une pièce de musée. Il n’est pas un souvenir, il n’est pas un mort, il n’est pas une divinité. Il est en vie, il vit ! Il est une lumière, un halo, une âme, un élan lui aussi. Il court vers sa fin, vers sa vie, vers ses envies, vers ses besoins, vers ses ailleurs, vers ses futurs, il fuit, il avance, il présence, s’il est là.

Aimer assez pour oublier son horrible désir de conquérir un autre chosifié.

« Je t’aime assez pour ne plus t’aimer », « Je t’aime assez pour t’aimer comme tu m’appelles »,  « Je t’aime comme tu le sens ».

Valériane Des Voiles

 

Author Valériane Des Voiles

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Join the discussion 2 Comments

  • Romain dit :

    L’intransigeance face au compromis. Je trouve ce texte à la fois beau mais tellement dur.
    Il me rappelle un extrait du texte d’Antigone d’Anouilh.

    « CREON: Tu l’apprendras toi aussi, trop tard, la vie, c’est un livre qu’on aime, c’est un enfant qui joue à vos pieds, un outil qu’on tient bien dans sa main, un banc pour se reposer le soir devant sa maison. Tu vas me mépriser encore, mais de découvrir cela, tu verras, c’est la consolation dérisoire de vieillir, la vie, ce n’est peut-être tout de même que le bonheur!

    ANTIGONE: Le bonheur…

    CREON: Un pauvre mot, hein?

    ANTIGONE: Quel sera-t-il, mon bonheur? Quelle femme heureuse deviendra-t-elle, la petite Antigone? Quelles pauvretés faudra-t-il qu’elle fasse elle aussi, jour par jour, pour arracher avec ses dents son petit lambeau de bonheur? Dîtes, à qui devra-t-elle mentir, à qui sourire, à qui se vendre? Qui devra-t-elle laisser mourir en détournant le regard?

    CREON: Tu es folle, tais-toi.

    ANTIGONE: Non, je ne me tairai pas! Je veux savoir comment je m’y prendrai, moi aussi, pour être heureuse. Tout de suite, puisque c’est tout de suite qu’il faut choisir. Vous dîtes que c’est si beau la vie. Je veux savoir comment je m’y prendrai pour vivre.

    CREON: Tu aimes Hémon?

    ANTIGONE: Oui, j’aime Hémon. J’aime un Hémon dur et jeune; un Hémon exigeant et fidèle, comme moi. Mais si votre vie, votre bonheur doivent passer sur lui avec leur usure, si Hémon ne doit plus pâlir quand je pâlis, s’il ne doit plus me croire morte quand je suis en retard de cinq minutes, s’il ne doit plus se sentir seul au monde et me détester quand je ris sans qu’il sache pourquoi, s’il doit devenir près de moi le monsieur Hémon, s’il doit apprendre à dire « oui », lui aussi, alors je n’aime plus Hémon! »

    Antigone – Jean Anouilh

    • « Comprendre, toujours comprendre. Moi, je ne veux pas comprendre. » fût une devise de ma jeunesse…Antigone est une héroïne qui m’a fascinée, et le texte d’Anouilh a marqué durablement mon goût pour les personnages intransigeants et passionnés. Les tragédies en sont pleines, mais pas seulement. C’est Salammbô de Flaubert; c’est Médée dans le film de Pasolini; c’est les jeunes; mais les très vieux aussi; les conquérants, les poètes plus ou moins maudits, la caissière du prisu qui donnait l’autre jour des leçon de justice et d’humanité à qui voulait l’entendre…