Sous le ciel froid et étoilé de novembre, Aline repose.

L’air est si léger qu’il est coupant. Il est glacial, mais pur ; il pourrait être de cristal. Son tintement d’ailleurs rappelle à Aline le son brillant d’une voix qu’elle a entendue un jour, sans se souvenir à qui elle avait pu appartenir. Le ciel noir et muet, lui parle, comme à une amie.

Chaque étoile lui semble percée dans une voûte noire, comme pour révéler l’existence d’un autre monde qui serait, lui, toujours lumineux. De son œil, Aline fixe l’un de ces trous incroyables. Elle tente d’en déceler le mystère, et, si possible, de voir ce qu’il y a derrière. Elle ne pèse plus rien, et vit toute entière dans la tension de son regard. Elle s’est assise, sans s’apercevoir qu’ainsi elle était un peu plus loin de ce qu’elle cherchait à voir.

Elle ne songe pas même à l’étrangeté de sa situation : si vivante, alors qu’elle est mourante. Aussi loin qu’il soit possible de remonter dans l’existence d’Aline, elle a toujours su qu’elle était en train de mourir. Et pourtant, à chaque instant, elle l’oublie, comme en ce moment où d’un regard elle embrasse la beauté glacée d’une nuit d’automne. Elle sait qu’il faut mourir, et elle le sait si bien, en vérité, qu’elle n’a plus besoin d’y penser.
C’est un fait, qui s’est accordé à sa façon d’être dans le monde. C’est une évidence à laquelle elle a tout abandonné. Sans songer à rien, elle vibre au rythme des éclats que lui jette son étoile.

Sans y voir la moindre trace d’espoir, car Aline n’avait jamais lu Dante, ni sans y voir la moindre ironie sourde, parce qu’elle ne connaissait pas non plus la rage des poètes devant le silence de la sublime nuit, elle vibre dans une étoile, mieux que quiconque avait vécu jusqu’à lors.

Une béatitude légère l’a élevée, et l’a enlevée à elle-même, et sa conscience semble s’être évanouie tout à fait. Avec ses yeux fixes et grands ouverts, elle sombre dans la nuit sombre…est ce la mort ? Non. Ce n’est rien.

(à suivre!)

Valériane Des Voiles